Comme chaque année le gestionnaire des réseaux électriques français RTE publie le bilan électrique national de l’année écoulée. Nous vous invitons à consulter ce document ici : https://analysesetdonnees.rte-france.com/bilan-electrique-synthese
Les points marquants :
Une consommation d’électricité en net recul par rapport aux niveaux d’avant crise
La consommation a représenté 459,3 TWh. Elle se situe en retrait de 1,7 % par rapport à 2021, une baisse comparable à celle observée en 2009 lors de la crise financière
Le niveau de consommation est également inférieur à celui de 2020 (461 TWh), année pourtant largement marquée par les confinements et le recul de l’activité économique du fait de la crise sanitaire.
La baisse de consommation a d’abord été observée dans l’industrie, plus exposée aux variations des prix en l’absence de protection tarifaire. Les secteurs industriels les plus intensifs en énergie, tels que la chimie, la métallurgie et la sidérurgie, ont été les plus touchés (respectivement -12 %, -10 % et -8 % sur l’année et -19 %, -20 % et -20 % entre septembre et décembre).
Elle s’est ensuite élargie à tous les secteurs, notamment au secteur résidentiel tertiaire ( -5 % en moyenne au cours des quatre derniers mois de l’année).
Une production en berne
Le volume total d’électricité produit en France en 2022 a atteint 445 TWh soit un recul de 15 % par rapport à l’année 2021 (522 TWh). Il s’agit du niveau le plus faible depuis 1992.
Ceci est le reflet de la faible disponibilité du parc nucléaire, dont la production a baissé de 82 TWh par rapport à 2021, ainsi que des contraintes sur la production hydraulique (-12 TWh). Ces diminutions ont été partiellement compensées par l’augmentation de la production à partir de gaz (+11 TWh) et par la croissance de la production solaire (+4 TWh).
La disponibilité du parc nucléaire a été historiquement basse tout au long de l’année conduisant au niveau de production le plus faible depuis 1988
La disponibilité du parc nucléaire français s’est située à un niveau historiquement faible, tout au long de l’année 2022, s’établissant à 54 % contre 73 % en moyenne entre 2015 et 2019.
La production du parc nucléaire français a fortement baissé en 2022 par rapport aux années précédentes, avec un volume produit de 279 TWh (soit 62,7 % de la production totale) contre 360,7 TWh en 2021.
La production hydraulique a atteint son plus bas niveau depuis 1976, en raison des conditions climatiques exceptionnellement chaudes et sèches
Avec un total de 49,6 TWh sur l’année, la production hydraulique est en recul de 20 % par rapport à la moyenne 2014-2019 (61,6 TWh couvrant une amplitude de 53 TWh en 2017 à 67,7 TWh en 2018).
Les précipitations ont été globalement déficitaires sur l’année, se situant 25 % en dessous des normales. Ce déficit de précipitations a eu un fort impact sur la disponibilité de la production hydraulique : les stocks ont atteint des niveaux historiquement bas à mi-juillet.
Un volume record d’énergies renouvelables installées en 2022
En 2022, un volume record d’installations renouvelables a été mis en service (5 GW)
Le parc éolien terrestre installé a progressé de 1,9 GW en un an, passant de 18,7 GW à fin 2021 à 20,6 GW au 31 décembre 2022.
Le développement du parc solaire s’est maintenu à un rythme soutenu pour la deuxième année consécutive, avec une augmentation de 2,6 GW par rapport à fin 2021.
Le parc Solaire
Le développement du parc solaire s’est maintenu à un rythme soutenu avec une augmentation de 2,6 GW par rapport à fin 2021.
Le parc solaire a atteint 15,7 GW à fin 2022.
Grâce au développement du parc et au bon ensoleillement, le volume de production solaire a connu une augmentation significative en 2022 (+31 % sur l’année), atteignant 18,6 TWh.
Le facteur de charge du solaire en 2022 remonte légèrement à 14,6% contre 13,9% en 2021
Le parc éolien
Alors que la puissance installée a augmenté de 10% passant de 18,7GW à 20,6GW la production a augmenté de seulement 1,9% par rapport à 2021 passant de 36,9TWh à 38,1TWh.
Le facteur de charge moyen s’est établi à 21,6% poursuivant sa baisse par rapport à 2021 (23,2%) et 2020 (26,6%). Ce facteur de charge est le plus mauvais pour l’éolien depuis que les données sont collectées dans la base open-data Réseaux-Energies (https://odre.opendatasoft.com/explore/dataset/fc-tc-nationaux-mensuels-eolien-solaire).
Utilisation du parc thermique a été en nette augmentation + 34% de gaz
En 2022, les centrales à gaz ont été sollicitées à un niveau inédit.
Avec un volume produit de 44,1 TWh sur l’année (contre 32,9 TWh en 2021), le gaz est redevenu la troisième source de production d’électricité en France derrière le nucléaire et l’hydraulique.
La France a été importatrice nette d’électricité pour la première fois depuis 1980
La souveraineté énergétique de la France n’est plus.
Pour la première fois depuis 1980, le solde des échanges français est importateur, avec un solde net de 16,5 TWh, ce qui représente un peu moins de 4 % de la consommation nationale d’électricité.
Alors qu’en 2021 la France avait été importatrice nette seulement sur la frontière avec l’Allemagne et la Belgique (10TWh), en 2022, le fossé se creuse, le déficit passe à 27 TWh sur la frontière avec l’Allemagne et la Belgique, et la France devient aussi importatrice nette sur les frontières britannique (10 TWh) et espagnole (9 TWh)
Elle est restée exportatrice sur les frontières italienne et suisse (respectivement 18 et 12 TWh d’exports).
La facture énergétique de la France a explosé et pèse sur sa balance commerciale
La facture énergétique de la France a atteint 115 Md€ en 2022, une augmentation d’environ 70 Md€ par rapport à 20211.
Cette dégradation est principalement portée par les produits fossiles, dont la facture a augmenté d’environ 60 Md€ par rapport à 2021. Ceci découle des prix plus élevés des combustibles fossiles et du recours accru au gaz naturel liquéfié, dont les importations ont fortement augmenté.
L’achat d’électricité à nos voisins a couté à la France 7 Milliards d’€, alors que jusqu’à présent la vente de notre surplus d’électricité rapportée en moyenne 2 Milliards d’€ en moyenne à EDF (sur les années 2014-2019) et 3 Milliards d’€ en 2021.
Le solde commercial a chuté de 78 Milliards d’€ en 2022 pour atteindre son nouveau plus bas historique à 163 Milliards d’€.
Les émissions de CO2 dans la production d’électricité sont en hausse
Malgré une production d’électricité en baisse par rapport aux années précédentes, les émissions de gaz à effet de serre du système électrique ont atteint 25 MtCO2éq, (Millions de tonnes d’équivalent CO2) contre 21,5 MtCO2éq en 2021. Cette augmentation est le reflet de la sollicitation accrue des centrales à gaz sur l’année.
Ces émissions proviennent de notre production avec un usage accru des centrales gaz en France et des importations d’électricité essentiellement de l’Allemagne dont la production d’électricité a été largement couverte par des centrales charbon (Lignite) et gaz. Les Allemands ayant réouvert leurs centrales à Lignite pour pallier le manque de gaz russe.
Au final la production d’électricité française s’est composée en très grosse partie de nucléaire à hauteur de 60% , d’ hydro-électricité (11%), de gaz (10%), d’éolien (8%), de BioNRJ, Charbon, fioul (5%), du solaire (4%) et des imports (4%).
En conclusion: – de nucléaire + d’ENR intermittent + de gaz = + de CO2
La crise du gaz et l’envolée du prix de l’énergie ont mis en lumière l’importance de notre souveraineté énergétique et des outils de production dont le principal est le parc nucléaire qui assure plus de 70% en temps normal de notre production d’électricité.
La France qui était jusqu’à présent le premier exportateur net d’électricité d’Europe a pour la première fois depuis 1980 acheté plus d’électricité qu’elle n’en a vendu. Les imports d’électricité ont participé à hauteur de 4% à la production d’électricité Française ce qui est considérable.
La fermeture massive du pilotable (charbon, fioul, Fessenheim ; autour de 10GW au total) dans les dix dernières années n’a pas permis de faire face, même partiellement, au manque de nucléaire et à la performance médiocre des ENR quand on en a besoin.
Dans les prochains mois, la Stratégie française énergie climat (SFEC), qui constituera la feuille de route de la France pour atteindre la neutralité carbone en 2050, sera remise à jour et redéfinira les nouveaux objectifs de politique énergétique du pays.
Espérons alors que se redessinera une politique énergétique souveraine et de bon sens qui privilégiera des moyens de productions d’électricité pilotables bas carbone, qui s’intéressera enfin aux énergies renouvelables thermiques (bois-énergie, géothermie, petit solaire, biomasse, biogaz), les seules qui pourraient se substituer aux énergies thermiques émissives de gaz à effet de serre (gaz, fioul) comme l’indique le rapport de la Cour des comptes 2018 et qui mettra en œuvre une réelle politique de sobriété énergétique.